Les épices proviennent d’arbres ou de plantes utilisées depuis la nuit des temps pour leur gout, leurs parfums et leurs vertus médicinales. Issus d’abord de la cueillette elles ont fait l’objet d’un commerce lucratif et ont ensuite étaient cultivées en quantités gigantesques pour entretenir la fièvre que les européens avaient pour ces arômes du bout du monde !
Leur utilisation a d’abord joué un grand rôle dans la pharmacopée du Moyen Age et de l’Antiquité et continue a joué un rôle ici dans la fabrication du jamu (remède traditionnel indonésien). On pense souvent qu’elles étaient utilisées au Moyen Age pour masquer le goût des viandes avariées… c’est sans doute une erreur car les épices étaient des produits de luxe, réservées aux grands dignitaires qui pouvaient se permettre da manger de la viande fraîche ! Il n’en demeure pas moins qu’à cette époque déjà leurs vertus antimicrobiennes étaient identifiées et utilisées pour la conservation de la viande/span, pratique qui s’est développée lorsque certaines épices comme le poivre sont devenues populaires à partir du XV siècle.
Dans le bassin méditerranéen, les Grecs et les Egyptiens les utilisaient déjà en onguents et certaines sont même évoquées dans la Bible. On retrouve également des références à leur utilisation dans des manuscrits anciens chinois et dans le Ramayana, cette grande épopée Indienne écrite probablement 200 ans avant J.C. où il est fait référence au girofle.
Le commerce des épices s’est développé surtout au Moyen-Orient à
partir de 2000 ans avant J.C. avec la cannelle, la casse du
cassier et le poivre qui à cette époque faisaient partie des
biens les plus précieux. Les Romains ont eux aussi poursuivi
cette quête et on retrouve la trace de leur engouement pour ces
saveurs lointaines dans les récits de Pline l’Ancien. En Asie du
Sud, c’est la muscade, originaire des
îles Banda
dans les Moluques, qui a attiré toutes les convoitises. De leur
côté les premiers marchands de l’archipel indonésien (que l’on
nommée à l’époque les îles de la Sonde) allaient jusqu'en Chine,
en Inde, au Moyen-Orient et sur la côte Est de l'Afrique. Quant
aux marchands arabes, ils contrôlaient les routes entre le
Proche-Orient et l'Inde jusqu'à l'époque romaine. Peu à peu, la
ville d'Alexandrie en Égypte est devenue le centre du commerce
des épices grâce à son port et enfin du XIIIe siècle au XVe
siècle, c’est la ville de Venise qui a exercé le monopole du
commerce des épices avec le Moyen-Orient. C’est à cette époque
que les Portugais entrent en jeux et dessinent les contours de
ce qui sera plus tard l’Indonésie.
L’histoire de l’Indonésie est en effet intimement liée au
commerce des épices et à l’extension coloniale qui s’est
développée à partir du XVe siècle. C’est l’époque «Des Grandes
Découvertes», des géographes, des navigateurs avec la mise en
place de comptoirs commerciaux dans tout l’Océan Indien.
Le
contrôle des routes commerciales et des régions productrices
d'épices a été la principale raison de l’expédition du
navigateur portugais Vasco de Gama vers l’Inde. Mais c'est
Afonso de Albuquerque (1453 - 1515) qui a permit aux Portugais
de prendre le contrôle des voies maritimes arabes vers l'Inde.
En 1506, il prend l'archipel de Socotra à l'entrée de la Mer
Rouge et, en 1507, Ormuz à l'entrée du Golfe Persique. Devenu
vice-roi des Indes, il prend Goa en Inde en 1510 et Malacca sur
la péninsule Malaise en 1511. Les Portugais installent alors des
comptoirs de commerce dans différentes îles de l’archipel qui
n’est à l’époque constitué que de petits royaumes indépendants
et peuvent désormais commercer directement avec le Siam, la
Chine et les Moluques. La route de la soie est doublée par les
voies maritimes portugaises, amenant ainsi par Lisbonne en
Europe les trésors de l'Orient, dont les épices tant
convoitées.
Ce sont les hollandais qui ensuite vont
s’emparer de la région et développer encore les voies
commerciales dont la route des épices. En 1602 la «Compagnie
unie des Indes Orientales» (Vereenigde Ooste Indishe Compagnie, VOC) est fondée, elle peut traiter avec les souverains
locaux, faire la guerre, lever des troupes, posséder des navires
de commerce et de guerre, construire des forts. Elle occupe en
1605 un premier fort portugais aux Moluques. Désireuse de
contrôler le commerce du poivre vers l'Europe, la VOC prend
Jayakarta, une petite place forte vassale de Banten, en 1619 et
la rebaptisent Batavia en l'honneur de leurs ancêtres, les
Bataves. (Elle deviendra à l’Indépendance de l’Indonésie
Jakarta).
En 1641, les Hollandais prennent Malacca
aux Portugais. Ils occupent Kupang, un comptoir portugais dans
l'ouest de Timor, en 1653.
Au XVIIe
siècle, le royaume de Gowa dans le Sud de Sulawesi menace la
suprématie que les Hollandais veulent imposer dans l'Est de
l'archipel indonésien. Gowa finit par être vaincue. Au cours du
XVIIIe
siècle, Java devient le théâtre de guerres de successions qui
poussent la VOC à intervenir. Elle impose aux princes javanais
de signer en 1755 le traité de Giyanti, qui consacre la
souveraineté hollandaise sur Java.
Vers 1750, toute l’île de Java est ainsi dominée par
la VOC. Ailleurs, les Hollandais gouvernent par l’intermédiaire
des princes locaux, qui vivent des tributs prélevés sur les
paysans. À Sumatra, la VOC les utilise comme intermédiaire de
son commerce par les comptoirs de Padang et de Palembang. Le sud
de Bornéo attire également la compagnie en raison de ses
ressources en poivre, diamants et or. De leur côté, les Moluques
connaissent à cause des épices le régime le plus dur. Les quotas
fixés à la baisse par la VOC sur le girofle et la muscade
provoquent la misère des habitants qui dépendent de la Compagnie
pour leur ravitaillement. Quand les marchés européens réclament
plus d’épices et que les prix montent, la VOC impose d’accroître
la production. Mais les populations refusent, craignant de
devoir plus tard arracher leurs plantations. Un bras de fer
s’installe peu à peu avec les autres nations avides à leur tour
de s’enrichir dans ces îles lointaines et malgré l’interdiction
du transport des semences, les Britanniques et les Français qui
avaient eux aussi installé quelques comptoirs, introduisent
alors clous de girofles et muscades dans leurs colonies,
compromettant le monopole hollandais.
Les rivalités
s’exacerbent, les conflits et les tractations entres royaumes
locaux et colons engendrent des guerres ouvertes, des rébellions
et des trahisons…
En 1824, le traité de Londres
‘réparti’ le monde malais entre les Anglais et le Hollandais.
Les premiers comptoirs fortifiés font place à de grandes villes
commerçantes qui seront plus tard les grandes métropoles de la
République Indonésienne…
Enfin en Papouasie, la population consomme un grand nombre de variété de patate douce et transforme le tronc du palmier sagoutier en une fécule comestible.